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Il était une fois… une maison… et une colline…

La maison sur la colline

 Une maison, c’est le terme familier et affectueux à la fois que des générations d’élèves puis d’anciens utilisèrent et utilisent encore parfois pour désigner l’établissement catholique d’enseignement connu à Nice sous le nom de STANISLAS-MASSENA, héritier du Petit Séminaire fondé par Monseigneur Galvano le 6 Septembre 1839 et de l’école Masséna qui accueillirent de nombreuses générations de Niçois.

 Une colline, c’est celle de Carabacel, nommée dans les siècles passés colline Saint-Charles. Son souvenir subsiste en un petit chemin qui la traverse en direction de l’avenue des Arènes. Cette colline, qui constitue une avancée de celle de Cimiez avec laquelle on la confond trop souvent, fait partie intégrante de la campagne niçoise, plantée d’arbres de toutes sortes, qui apparaît tel un immense jardin. Lorsque les Niçois partaient gravir les pentes de la colline de Carabacel, »un de ces lieux où souffle l’esprit » comme aimait à le répéter le Chanoine Ponsard, un des plus illustres supérieurs de l’Ecole Masséna, ils ne parcouraient alors nul boulevard de Cimiez : celui ci sera l’oeuvre de Sébastien-Marcel Biasini qui en achèvera le percement en 1800 dans le prolongement du boulevard Carabacel. La colline de Carabacel est alors seulement traversée par le chemin des moines qui aboutit au monastère des frères Fransiscains à Cimiez, en suivant approximativement le tracé de l’avenue des Arènes. En fait de cultures sur l’agreste colline, le manque d’eau ne permet alors que celles de la vigne, des oliviers, des orangers ou des figuiers aux fruits très renommés. On y découvrait alors seulement de vastes propriétés, véritables latifundia appartenant à de riches étrangers ou à des notables niçois, nommées villas sur les divers plans de l’époque. Apparaissent ainsi sur ces plans des noms tels que ceux des villas Malausséna, Castel, Thaon, Massingy, Pontio, Perret, Branicka plus connue sous le vocable de propriété de l’Olivéto, Venanson, Potocka, … Ces diverses villas accueillirent des hôtes parfois célèbres, parfois anonymes, dont bon nombre de Polonais sous occupation russe. On parle souvent des Russes de Nice, bien moins des Polonais qui furent pourtant nombreux à séjourner sur la côte. La plupart de ces propriétés dont certaines tiendront une place notable dans les pages qui suivent ont subi non pas tant les outrages du temps que la folie dévastatrice de promoteurs assoiffés de bâtir le plus grand nombre possible d’appartements sur la plus petite surface elle même possible, dans la perspective du plus grand profit… La forêt et la nature ont ainsi laissé la place au béton.

De leur rencontre naquit une histoire à nulle autre pareille.

Qui donc aurait pu imaginer, alors que Nice n’appartenait pas encore à la France, les diverses péripéties et vicissitudes que rencontrerait cet établissement au fil des années, depuis sa naissance au bord des rivages méditerranéens non loin du port, en passant par sa résurrection sur la colline de Carabacel dans l’ancienne propriété de la comtesse polonaise Delphine Potocka, jusqu’au moderne établissement niçois ?

Le comté de Nice possède un passé fascinant pour celui qui cherche à le connaître, passé trop souvent ignoré volontairement de ceux qui lui sont étrangers, car il manifeste un particularisme que la volonté moderne d’uniformisation ne peut tolérer.

La maison sur la Colline de Carabacel, cette maison, qu’est Stanislas, au sens fort d’un lieu de vie, d’un établissement scolaire, est riche d’un passé hors du commun. Avant d’abriter l’Institution scolaire, elle fut propriété d’une femme d’exception, étrangère à son temps par bien des traits de caractère : une comtesse polonaise, amie des lettres et des arts, tenant salon à Paris comme à Nice, Delphine Potocka. Celui qui accorde une âme à une maison, à un lieu, ne peut qu’être frappé par l’incessante présence de la culture dans cette maison niçoise. Présence qui fut celle des artistes et lettrés du XiXème, avant d’être celle assurée par les religieuses enseignantes de l’Assomption qui précédèrent le moderne établissement scolaire. Et pourtant, qui peut soupçonner, en franchissant le seuil de l’établissement, quels furent les hôtes de la propriété de la comtesse ?

Celui qui contemple le Cimiez cosmopolite d’aujourd’hui, recouvert d’un béton froid et impersonnel où se perdent encore quelques rares oasis de verdure, ne peut que ressentir de la nostalgie en imaginant ce qu’était autrefois l’agreste colline de Carabacel couverte d’arbres aux essences diverses. Parmi ces oasis, l’une d’entre elles nous est familière sous un nom ou un autre, Ecole de l’Assomption, Ecole Masséna ou Collège Stanislas… Cependant c’est non loin du port de Nice, aux abords du boulevard Impératrice de Russie, qu’il nous faudra d’abord tourner notre regard, en nous reportant au début du siècle dernier.

Extrait du livre « La maison sur la colline »
De Monsieur Edgar PETIT